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L’utilisation des plantes comme alternative et/ou complément à un traitement médicamenteux classique devient actuellement populaire. Du fait de la prise conjointe de médicament et de plantes, l’interaction plantes/médicaments est envisageable en pharmacocinétique et en pharmacodynamique. Les patients pratiquent également une automédication avec plusieurs plantes ou préparations à bases de plantes, conjointement au traitement médical. Croyant cette pratique sure, l’automédication est le plus souvent faite sans même en avertir le médecin traitant. Il est donc important d’identifier les interactions plantes/médicament potentielles afin de prendre toutes les précautions qui s’imposent pour l’administration de plantes. Andrographis paniculata - plante de la famille des Acanthaceae - est un exemple de plante médicinale utilisée depuis plusieurs siècle en Asie pour traiter les maladies chroniques et infectieuses. Dans une première partie de ce travail sont présentées successivement une revue sur d’Andrographis paniculata, une sur la biotransformation des xénobiotiques, particulièrement celle des cytochromes P450, l’enzyme la plus importante du métabolise des xénobiotiques, et enfin une sur des exemples d’interactions plante/médicament. Dans une seconde partie, les résultats expérimentaux sont présentés. Ils peuvent être résumés de la manière suivante : les effets de l'extrait hydroalcoolique d’Andrographis paniculata (EAP), plante largement utilisée en médecine Thaïlandaise, et de son diterpène majoritaire, l’Andrographolide (AND), sur l'activité des CYPs hépatiques ont été examinés in vivo et in vitro chez le rat et in vitro chez l'Homme. In vitro, dans les microsomes hépatiques, l’EAP inhibe l’hydroxylation CYP2C-dependante du tolbutamide avec un Ki respectivement de 8,21 pour le rat et 7,51 μM pour l'Homme. Le mode d'inhibition est de type mixte mais probablement non métabolisme-dépendant. Après administration d’EAP et d’AND in vivo chez le rat, l’expression et l’activité du CYP2C11 ont significativement varié: une diminution de 30% de l’activité CYP2C11 a été observée à 0,5 et à 2,5 g d’EAP/kg/jour (correspondant respectivement à 5 et 25 mg d’AND/kg/jour), par rapport au groupe contrôle, ainsi qu’une diminution d'expression de l’isoforme CYP2C11. À 5 et 25 mg d’AND pur /kg/jour, l’activité CYP2C11-dependante est diminuée de 50% par rapport au contrôle. In vitro dans les cultures primaires d’hépatocytes de rat et humains, incubées avec 50 μM d’AND ou d’EAP, d’importantes diminutions des niveaux d'activité et de l’expression des ARNms des CYP2C et CYP3A ont également été mises en évidence. En conclusion, la présente étude montre qu’il n’est pas exclu que l'extrait d’Andrographis paniculata (EAP) ainsi que son diterpène majoritaire (AND), puissent provoquer chez l'Homme des interactions médicamenteuses en cas de co-administration avec des médicaments classiques, ceci par inhibition de l’expression et de l’activité des CYP2C9 et CYP3A4.