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L’activité de notre association Charles Gide reprend, pour son cycle de conférences "le forum Nîmois Charle GIDE" Jean MATOUK président de l'assosiation et professeur des universités recoit, le 29 janvier, au lycée Alphonse Daudet de N îmes, Jean Pierre Filiu.
Il porté de nombreuses
casquettes, ce qui explique, sans doute, la richesse de sa pensée.
Diplômé de Sciences Po Paris en 1981, auteur d’une thèse
d’histoire sous la direction de Jean Noël Jeanneney, qui nous rendra visite à
l’automne, il est aussi diplômé de l’Institut national des langues orientales,
arabisant, mais capable aussi de prononcer des conférences en anglais et
espagnols. Il a été le délégué de la fédération internationale des Droits de
l’homme au Liban en pleine guerre civile.
Il a ensuite été conseiller des Affaires étrangères et à ce
titre, a été en poste en Syrie et Tunisie, et conseiller diplomatique dans les
cabinets de Pierre Joxe à l’intérieur comme à la Défense, puis du Premier
ministre Lionel Jospin.
Depuis 2006, il est professeur à Sciences Po Paris,
évidemment sur le monde arabo musulman
et le Proche orient, mais il continue à conférencer aussi bien aux Etats-Unis,
à Boston, que dans des tas d‘autres pays.
Sa bibliographie est abondante : treize livres, sur le
Proche-Orient et les arabes, plus la participation à l’ouvrage collectif
« Qui est Daesch » avec Edgar Morin, Régis Debray, Gilles Kepel,
Michel Onfray. Mais aussi, preuve d’un étonnant éclectisme intellectuel, un
livre, en fait sa thèse, sur Mai 68 à l’ORTF, en 2008, un autre, la même année
sur « Jimmy Hendrix, le gaucher magnifique », et un dernier, en 2010,
aux Mille et une nuit, sur Cameron et la révolution du flamenco.
J’ai lu son excellent dernier livre : « Les arabes
leur destin et le nôtre », qui, avec quelques autres de ses ouvrages vous
est proposé ici ce soir, au nom du libraire « Les lettres de mon
moulin » de nos amis retenus par la préparation du salon de la biographie,
par deux membres de notre Conseil d’administration, Annie Julien et Francine
Cabanes.
Ce livre est un formidable panorama chronologique de
l’histoire des arabes aussi bien dans le Machrek, à l’est de Suez, que dans la
Maghreb.
J’ai toujours un problème avec le mot « arabe » et
c’est une forme de première question à Jean Pierre. En tant qu’ethnie, les
arabes proprement dits, proviennent de la Péninsule arabique et ont commencé
une colonisation culturelle et religieuse de l’ensemble des deux zones Machrek,
ou Levant (Irak, Syrie, Jordanie, Palestine, Liban), et Maghreb ou Couchant,
comportant la Tunisie, l’Algérie et le Maroc, dont le nom arabe est d’ailleurs
Al Maghrib, avec un doute de position sur l’Egypte et le Soudan. Mais dans ces
pays pré-existaient évidement des ethnies très différentes. Des berbères et
kabyles à l’ouest, avec une rémanence des Vandales européens. De nombreuses
ethnies levantines, dont les descendants des Phéniciens, des Assyriens, des
Egyptiens, et des palestiniens, Pelestè, peuple de la Mer selon Herodote,
Philistins de la Bible, dont l’historien Schlomo Sand dit qu’ils furent les
auteurs, avec des intellectuels assyriens, des fondements du judaïsme.
Ethniquement, tous ces peuples, n’ont rien d’arabes. Comme
c’est dit fort bien dans « wikipedia » ils sont
anthropologiquement différents mais s’identifient par les liens linguistiques
et culturels. Ils sont arabophones, et, pour un grand nombre d’entre eux,
musulmans. Car si, à partir de 1492, l’Eglise catholique a imposé par la force
de son sabre, le goupillon aux Amérindiens, ce dont les papes se sont excusés,
les envahisseurs arabes, eux, sept siècles auparavant, avaient su aussi imposer
le croissant par le sabre, sans possibilité de retour. Et, eux, sans aucun
regret !
Malheureusement, la conquête islamique continue depuis une
trentaine d’année par le vide, c’est-à-dire par les départs de juifs, retranchés
en Israêl, et, depuis trente ans, par la fuite des chrétiens, devant les
exactions et menaces, redevenus sanguinaires avec Daesch. Les chrétiens
d’Orient qui représentaient, au début du XXème siècle, 12 à15% de la population,
ne constituent plus aujourd’hui que 5% des 300 millions d’arabes au Machrek, et,
leur nombre absolu, plutôt stable en raison de leur fécondité, jusqu’aux années
2000, décline aussi fortement ces dernières années. Pour un juif, comme pour un
chrétien, voir la terre d’origine du judaïsme et du christianisme vidée, plus
ou moins par la force, des fidèles de ses religions a quelque chose, j’ose le
dire, de scandaleux.
Pour Jean Pierre Filiu, l’histoire commune des européens, et
surtout des français et anglais avec le monde dit arabe, est faite
d’expéditions militaires et de colonisations brutales, je le cite :
« de promesses trahies et de
manœuvres diplomatiques, puis, après les décolonisations, de dictatures féroces et de régimes
obscurantismes ».
Si j’ai bien compris, il y avait eu la première Nahda,
c’est-à-dire la renaissance arabe, lors des premières cohabitations du XIXième
siècles (je n’oublie pas Charlemagne et Haroun Al Rachid, ni François Premier
et Soliman le Magnifique, mais ce n’étaient vraiment que des contacts). Les
Lumières arabes, souhaitaient s’allumer comme celle d’Europe deux siècles plus
tôt, Mais elles ont été étouffées par le pétrole qui a transformé la
cohabitation en colonisation, ayant entraîné ces dictatures sanglantes et les
pillages conséquents.
Vous considérez, Jean Pierre, que les évènements qui se sont déroulées
depuis février 2011, sont une sorte relance de la Nahda ? Pensez-vous, comme
Alexandre Adler, et, en un sens, comme récemment, dans Le Monde, Marcel
Gauchet, que la chevauchée sanglante de Daesch et son califat du sang, ne sont
que les dernières cartouches d’un intégrisme musulman salafisto-wahabite. Ce
dernier cédera-t-il la place à un nouveau monde arabe, occidentalo-compatible,
encore que je me pose, avec Régis Debray, la question de la nature de ce que
nous appelons l’Occident. Ce qui suppose, réciproquement, que nos cultures
occidentales deviennent, arabo – ou islamo compatibles, ce dont des décisions
hongroises, polonaises, danoises, récentes, laissent un peu douter.
Expliquez nous, Jean Pierre. Vous avez la parole pour
cinquante minutes
Mot(s) clés libre(s) : arabe, arabie, Monde arabe, Maghreb