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Les
recherches subaquatiques récentes menées par le DRASSM dans le Rhône à
Arles et au large de la Camargue face aux Saintes-Maries-de-la-Mer
apportent des informations nouvelles sur le fonctionnement du système
portuaire arlésien.
Ces données concernent tout
d'abord un vaste espace situé à l'embouchure de l'ancien Rhône de
Saint-Ferréol, où se trouvait très probablement l'un des avant-ports
maritimes principaux - avec Fos-sur-Mer - de la cité d'Arles. Dans ce
secteur aujourd'hui submergé, l'étude d'une vingtaine d'épaves romaines,
échouées principalement au Ier siècle de notre ère, a permis de
restituer le paléorivage, dont le tracé présente une forme à peu près
circulaire. L'exploration sous-marine de ce vaste lobe d'embouchure
ouvert sur la mer a livré des ancres antiques qui attestent l'existence
d'une zone de mouillage et de circulation. De plus, la découverte de
blocs de calcaire dispersés, parfois percés d'un orifice comme sur les
« navalia » de l'anse Saint-Gervais à Fos-sur-Mer, signale
vraisemblablement la présence d'édifices implantés sur des
atterrissements du Rhône. Ces différents éléments sont associés à un
très riche dépotoir portuaire constitué principalement d'amphores et de
céramiques, qui soulignent l'ampleur des échanges commerciaux dans cette
zone et montrent que ce site fonctionne sans discontinuité entre la VIe
s. av. J.-C. et le VIe siècle de notre ère.
D'autre
part, l'étude des épaves en Camargue et dans le lit du Rhône à Arles
enrichit notre connaissance des navires impliqués dans l'organisation
des trafics commerciaux, au sein d'un vaste espace nautique situé à la
charnière entre la navigation maritime et la distribution fluviale des
denrées. Devant les Saintes-Maries-de-la-Mer, un groupe varié d'épaves
comprend d'abord des navires hauturiers, à fort tirant-d'eau, dont les
plus grands restaient au mouillage vraisemblablement dans le lobe
d'embouchure. Il s'agit ensuite de caboteurs maritimes dotés d'une
quille mais à fond relativement plat, qui pouvaient emprunter les étangs
et franchir la passe d'embouchure. Certains d'entre eux possèdent en
commun un système d'assemblage par ligatures de la membrure au bordé,
attesté seulement sur une dizaine d'épaves en Méditerranée,
principalement entre Narbonne et Arles. Il correspond à une tradition
très particulière, à une période où la construction navale antique
n'utilise plus depuis longtemps de ligatures végétales pour assembler
ses structures. Près d'une douzaine d'épaves antiques marquent ensuite,
sur la rive droite du Rhône à Arles, la spécificité d'une zone de
rupture de charge et de redistribution des marchandises. Elles se
déclinent en plusieurs groupes incluant d'abord des navires maritimes de
petit tonnage, dotés d'une quille, qui pouvaient cependant remonter le
fleuve. Viennent ensuite des embarcations fluviomaritimes très ouvertes
aux influences méditerranéennes, assemblées notamment par tenons et
mortaises avec un fond plat dépourvu de quille. Les traces d'organismes
marins décelées sur leur fond de carène attestent qu'elles fréquentaient
la mer, sans doute au moment d'alléger les gros bateaux de charge
stationnés dans les avant-ports maritimes. On compte enfin des chalands
typiquement fluviaux, à fond plat, de type monoxyle assemblé.
Ces
épaves sont incluses dans de grands dépotoirs de type urbain et
portuaire qui révèlent l'ampleur et la richesse des activités
commerciales qui se déroulaient à Arles sur la rive droite du Rhône.
C'est en effet là, au pied d'une très belle façade monumentale dont
témoigne la découverte dans le fleuve de nombreux éléments
architecturaux et statuaires, que prenait place le principal port
fluvial d'Arles, entre la fin de la République romaine et l'Antiquité
tardive. Les très riches ensembles de mobiliers issus des fouilles
conduites sur ces dépotoirs livrent de nombreuses informations nouvelles
sur la vie matérielle et les échanges commerciaux dans l'un des plus
grands ports de l'Empire.
Mot(s) clés libre(s) : archéologie